Chapitre 1
Une ville sortie des eaux
Le rêve de Pierre Le Grand
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L’ambition d’un monarque constructeur
« Transplantés dans une cité artificielle, européenne, sans liens avec le passé, les premiers habitants de Saint-Pétersbourg se désespèrent. Non seulement ils ont perdu leurs biens, mais encore ils ont l’impression de n’être plus en Russie. En se promenant le long des canaux, ils se croient tantôt en Hollande, tantôt en Italie, tantôt en Allemagne ».
Henri Troyat, Pierre le Grand : Biographie, Paris, Flammarion, 2007, coll. « La Galerie des Tsars », p. 166.
Cette citation exprime le ressenti des premiers pétersbourgeois envers leur nouvel habitat et résume adéquatement la volonté de Pierre le Grand de bâtir la Russie de demain. Le tsar veut transformer la société par une réforme se basant sur le modèle occidental. Pour s’imprégner des méthodes européennes, de leurs cultures, et pour nouer des alliances, Pierre 1er organise la grande ambassade[1]. Comprenant environ 250 personnes, le groupe, auquel participe le tsar, sous le nom de Pierre Mikhaïlov visite les nations telles la Grande-Bretagne, la Hollande, passant par Berlin, Vienne, mais ignorant la France qui soutient l’ennemi ottoman[2]. Il ne repart pas « les mains vides » de son expédition. Ils sont entre 640[3] et 750[4], à être recrutés au service de la Russie[5]. Ils ont de divers profils, mais leurs spécialités trahissent les réels objectifs du tsar[6]. En visitant les pays occidentaux, ce dernier s’imprègne de leurs habitudes avec le caractère immersif de l’expédition.
Le voyage de Pierre 1er redéfinit les ambitions du tsar. Il veut mettre la main sur un port en mer Balte pour relier l’empire russe à l’Europe[7]. Pour espérer dominer ces eaux, la Russie doit vaincre celle qui contrôle cet espace, à savoir la Suède. Démarre alors un conflit qui va durer pas moins de deux décennies. Cependant, l’ambition des Suédois aura raison d’eux dans le golfe de Finlande. Le roi de Suède, Charles XII, âgé de quinze ans, se détourne un temps des Russes pour attaquer la Pologne, alliée du tsar. Une opportunité que saisit Pierre le Grand. Vainqueur dans la Neva en 1703, il fonde une nouvelle ville nommée Saint-Pétersbourg et, l’année suivante, bâtit une forteresse sur l’île de Kronstadt, au cœur du golfe de Finlande[8]. Le conflit continue jusqu’au traité de Nystad en 1721, qui sacre la victoire de la Russie[9].
Le fort suédois de Nyenschantz, situé au confluent de la grande Okhta et de la Neva, est ignoré au profit de la construction d’un nouvel édifice militaire[10]. Ce dernier est bâti rapidement entre mai et septembre 1703 ; il est constitué de bois et de pierres et placé à un endroit stratégique sur l’île aux Lièvres, située sur la grande Neva[11]. Une missive entre le favori du tsar, Menchikov, et le commandant de la forteresse, Steve Bruce, fait état de 40 000 pilotis pour permettre aux fondations de la citadelle de tenir[12]. Si autant d’efforts sont requis pour le premier bâtiment, il est probable que le lieu ne soit pas propice à l’établissement d’une telle citée.
L’espace géographique de la nouvelle ville est problématique et la toponymie le confirme puisqu’en finnois, Neva se traduit par marécage et boue[13]. L’estuaire de la Neva est divisé en de multiples branches, divisant la terre en îlot dont aucune ne dépasse les 30 pieds au-dessus du niveau de la mer[14]. Le terrain est humide dans son intégralité et une des hauteurs favorables à l’aménagement urbain est occupée par l’ancien fort suédois qui restera inhabité[15]. Les ressources sont limitées. Le bois de construction n’y est pas en nombre et doit être apporté en bateau de continent[16]. Malgré la présence suédoise, l’espace n’a jamais fait l’objet d’une colonisation. Seuls quelques hameaux autochtones perdurent dans une région qui conserve son état sauvage. Le climat y est également hostile. Les hivers sont longs et la Neva reste généralement gelée pendant six mois[17]. La Neva elle-même représente un défi. En effet, le volume d’eau déversé dans le golfe de Finlande équivaut à celui du Dniepr et du Don combiné[18]. Le courant est donc puissant. De surcroît, la largeur du fleuve rend l’élaboration d’un pont compliqué et même dangereux lorsque des blocs de glace circulent en automne et au printemps[19]. L’espace est sujet aux forts vents de l’Ouest qui, en plus d’empêcher la navigation, ont tendance à provoquer des crues[20]. « Admirateur des Hollandais, il [Pierre] veut, comme eux, domestiquer l’élément liquide. Saint-Pétersbourg sera une réplique russe d’Amsterdam. Une ville sur pilotis, traversée de canaux, divisée en îlots, un port au milieu des terres spongieuses[21] ». Le choix de bâtir Saint-Pétersbourg dans l’embouchure de la Neva permet au souverain de réaliser d’une pierre trois coups : il gagne un avantage territorial sur les Suédois ; Pierre peut enfin avoir accès à la Baltique qui ouvre vers l’Europe. Le tsar est conscient que l’embouchure de la Neva n’est pas favorable à l’établissement de la cité puisque plusieurs fois il est mis en garde[22]. Son choix est assumé et le tsar va se donner tous les moyens possibles pour accomplir son projet.
Sous le règne du tsar Pierre, l’urbanisme de Saint-Pétersbourg est enchevêtré entre deux paradigmes : la fortification de la cité et la volonté d’en faire une ville symbole. L’aspect militaire est représenté par le premier bâtiment, la forteresse Pierre-et-Paul, mais aussi par le grand chantier de l’Amirauté. Elle est la principale manufacture dans la première moitié du XVIIIe siècle[23]. La symbolique peut déterminer plusieurs pans de Saint-Pétersbourg, nouvelle capitale depuis 1713[24]. Il y a aussi dans ce transfert un côté mystique, assurément religieux, mais surtout l’idée d’en faire une ville nouvelle. Tel Dieu, Pierre décide de tout au gré de ses ambitions. Il veut faire de Saint-Pétersbourg une ville marine. Cela passe par la promulgation de lois coercitives. Pierre force la population à voguer sur la Neva, à user des voiles, à prendre des leçons de navigation, à entretenir les vaisseaux. Il en va de même pour la planification de la cité. Jusqu’en 1719, Pierre décide de ceux et celles qui doivent s’installer dans la nouvelle capitale[25].
À plusieurs reprises le créateur est tenté de placer son centre à divers endroits. Si l’Amirauté a la faveur initiale du tsar, il opte finalement, en 1720, pour l’île Vassilievski. S’en suivent des mesures autoritaires incitant les habitants à détruire leurs maisons actuelles pour aller dans le nouveau centre[26]. Ainsi, la ville répond au désir du tsar tout en étant non stratifiée, rompant avec les traditionnelles cités russes compartimentées. Saint-Pétersbourg, même si elle compte des quartiers, est une ville cosmopolite, en rupture avec la tradition russe et proche du modèle d’Amsterdam[27]. Le bâti est du ressort de Pierre. Vierge, Saint-Pétersbourg sera le laboratoire de l’urbanisme régulier qui impose l’imitation d’un type de maison pour les habitants, selon les principes de l’architecture européenne. Le tsar décide de la hauteur des maisons comme de la taille. Cette expérimentation deviendra une réalité pour les autres villes russes à la moitié du XVIIIe[28]. Cette contextualisation des débuts est nécessaire pour comprendre l’intérêt d’une telle entreprise. Elle est le fait du prince. Il est aisé de penser qu’à la disparition du tsar, en 1725, la ville est loin d’être le paradis promis par Pierre. Toutefois, les premières cartes laissent croire que la cité est un projet déjà avancé.
À plusieurs reprises le créateur est tenté de placer son centre à divers endroits. Si l’Amirauté a la faveur initiale du tsar, il opte finalement, en 1720, pour l’île Vassilievski. S’en suivent des mesures autoritaires incitant les habitants à détruire leurs maisons actuelles pour aller dans le nouveau centre[26]. Ainsi, la ville répond au désir du tsar tout en étant non stratifiée, rompant avec les traditionnelles cités russes compartimentées. Saint-Pétersbourg, même si elle compte des quartiers, est une ville cosmopolite, en rupture avec la tradition russe et proche du modèle d’Amsterdam[27]. Le bâti est du ressort de Pierre. Vierge, Saint-Pétersbourg sera le laboratoire de l’urbanisme régulier qui impose l’imitation d’un type de maison pour les habitants, selon les principes de l’architecture européenne. Le tsar décide de la hauteur des maisons comme de la taille. Cette expérimentation deviendra une réalité pour les autres villes russes à la moitié du XVIIIe[28]. Cette contextualisation des débuts est nécessaire pour comprendre l’intérêt d’une telle entreprise. Elle est le fait du prince. Il est aisé de penser qu’à la disparition du tsar, en 1725, la ville est loin d’être le paradis promis par Pierre. Toutefois, les premières cartes laissent croire que la cité est un projet déjà avancé.
La carte de Georg Paul Bush
La source de Georg Paul Bush publiée entre 1717 et 1721 possède quelques particularités. Les métadonnées partagées par la BNR expliquent que cette source répond à une mode russe en occident suite aux voyages du tsar en Europe, entre 1716-1717, poussant à la production cartographique. De plus, Bush aurait suivi les plans de l’architecte Trezzini pour dessiner une partie du document. Donc rien ne laisse croire que le cartographe se soit rendu sur place.
La source est parsemée de détails qui en font une représentation exagérée du développement de la cité. C’est le cas de l’ensemble de la cartographie avant 1737 précise Michael J Bitter. Il semble que ce soit un consensus parmi la communauté historienne puisque, selon Berelowitch et Medvekova, les gravures dépeignent Saint-Pétersbourg embellie. Or, elle est encore à l’état de projet tout en ayant un aspect impressionnant, par l’envergure de la tâche[29]. L’influence de Pierre le Grand n’est jamais très loin, jusqu’à la présence même du tsar sur le document dans le coin droit, en bas de la source. Si rien ne suggère que Pierre ait eu un droit de regard sur la source, cela démontre une allégeance du cartographe envers le souverain. Il n’est pas rare de retrouver ce type de gravure sur les plans de cette période, car elle met en exergue la puissance du tsar sur le territoire[30]. Dans le cas de Saint-Pétersbourg, la représentation de Pierre indique son influence sur la cité.
Quelles observations descriptives est-il possible de faire à partir de la source de Bush ? Premièrement, les habitations se répartissent sur l’île Vassilievski, située à l’ouest de la forteresse Saint-Pierre-et-Paul située sur l’île aux Lièvres. Les bâtiments englobent de manière linéaire l’île dans son intégralité et l’on repère également des lignes bleues qui peuvent correspondre à des canaux.
Au nord du fort on retrouvre le futur quartier de Pétersbourg. Cette île est occupée, d’après Bush, avec des maisons identiques, mais de manière plus disparate. Au sud-est du fort sont présentes des habitations similaires. Enfin, au sud, l’Amirauté diffère par sa représentation. Elle est moins ordonnée. Les maisons sont plus petites que les autres. Elles s’établissent le long de la Neva et du bâtiment de l’Amirauté, principale manufacture de la cité qui laisse penser que ce quartier regroupe les ouvriers de Saint-Pétersbourg. Il existe également quelques habitations éparses dans le coin est, appelé Vyborg, mais aussi à l’extrême Sud-Est, avec le monastère Alexandre Nevski.
Concernant le territoire, il est vastement représenté. Plusieurs îlots sont inhabités selon la carte et les espaces vides de population ne sont pas défrichés. Bush choisit de décrire les terrains vierges par des arbres. La seule variation est du côté de Vyborg où la symbolique est difficilement analysable. Excepté à l’est, à l’endroit où la Neva tourne à gauche après avoir remonté vers le nord, il n’y a aucune information confirmant la présence de marécage. La description de la Neva est limitée à la direction du courant et des rapides. La vaste représentation n’évoque pas de limite géographique et le territoire est à portée de développement puisqu’il n’y a aucune contre-indication.
L'île de Pétersbourg.
L'Amirauté.
Le monastère Alexandre-Nevski.
Figure 4. L’île Pétersbourg, l’Amirauté, le Monastère Alexandre Nevski. Veuillez appuyer sur les loupes pour de plus amples informations.
La réalité du terrain
La carte de Bush représente un environnement sécuritaire dans lequel la nouvelle capitale du tsar est appelée à prospérer. Cependant plusieurs facteurs permettent de mieux comprendre les obstacles qui se dressent face aux projets impériaux. Pour faire apparaitre ces éléments dans le SIG, il a fallu créer deux types de couches rassemblant les raisons des différentes péripéties. D’abord l’hydrographie, réunissant les composantes de l’eau comme la Neva, les inondations, le gel. Puis la topographie : dans ce cas-ci, ce qui touche aux élévations du terrain, qu’elles soient naturelles ou non.
La fin de l’hiver occasionne la réouverture des voies fluviales. C’est un évènement important, mais dangereux. La fonte des glaces provoque la constitution de blocs solides descendants depuis le lac Ladoga qui alimente la Neva, rendant la navigation risquée[1]. Si tout porte à croire que la Neva est un atout économique, le fleuve possède plusieurs handicaps. La carte de Bush indique à l’entrée de la ville la sortie des bateaux qui traversent des rapides et des bas-fonds. L’observateur et diplomate allemand à Saint-Pétersbourg, Friedrich Weber, témoigne que les bas-fonds sont délimités par des bouées et les bateaux qui veulent aborder le fleuve ne peuvent y entrer. Même les navires de guerre, qui sortent de l’amirauté, ne sont équipés qu’une fois la baie atteinte[2]. Pour ce qui est des bateaux commerciaux, ils ont l’interdiction d’entrer pour éviter de s’échouer sur les bancs de sable de l’estuaire. Ils amarrent sur l’île Kotline, où les cargaisons sont entreposées avant d’être chargées sur des vaisseaux, plus petits, qui peuvent traverser la baie avec moins de difficultés[3]. Ces péripéties représentent aussi une sécurité. Si les navires commerciaux et de guerre ne peuvent naviguer dans les eaux, il est probable qu’une flotte ennemie tentant de prendre d’assaut la capitale impériale rencontrera des ennuis à manœuvrer dans le golfe.
[1] Alexei Kraikovski et Julia Lajus, « Living on the river Over the Year. The Significance of the Neva to Imperial Saint Petersburg », dans Martin Knoll, Uwe Lübcken et Dieter Schott (éd.), Rivers Lost, Rivers Regained : Rethinking City-River Relations, Pittsburgh, University of Pittsburgh Press, 2017, p. 237-238.
[2] Friedrich Weber et Malassis, Nouveaux memoires sur l’etat présent de la Grande Russie ou Moscovie… Par un Allemand résident en cette cour, Paris, Pissot, 1725, p. 46-48.
[3] Alexei Kraikovski et Julia Lajus, « The Neva as a Metropolitan River of Russia: Environment, Economy and Culture », dans Terje Tvedt et Richard Coopey (éd.), A History of Water, Londres, 2010, p. 358.
Durant les premières années de la cité, où se déplacer en canot est le principal transport, il est requis de sortir son navire des eaux avant qu’il ne soit piégé par le gel. Si les bateaux ne peuvent être mis à terre, ils peuvent se réfugier entre la forteresse Pierre-et-Paul, et l’île de Pétersbourg considéré comme un endroit sécuritaire[1].
[1] Alexei Kraikovski et Julia Lajus, « Living on the river Over the Year. The Significance of the Neva to Imperial Saint Petersburg », dans Martin Knoll, Uwe Lübcken et Dieter Schott (éd.), Rivers Lost, Rivers Regained : Rethinking City-River Relations, Pittsburgh, University of Pittsburgh Press, 2017, p. 248.
La Neva pose un certain nombre de complications. De la fin du mois d’octobre, et jusqu’en avril, les eaux sont gelées. Impactant au quotidien les habitants à divers degrés. Au cœur de l’hiver, la couche de glace est épaisse et varie entre 61 et 92 centimètres avec une moyenne de 72 cm[1]. La cité n’ayant pas encore de pont, l’hiver constitue, dès 1710, une opportunité pour les Pétersbourgeois de traverser, à pied ou en traîneau, le fleuve pour rejoindre n’importe quel quartier. Il est même possible d’atteindre les îlots inhabités et l’avant-poste du golfe de Finlande, Kronstadt. À partir du XVIIIe siècle, les autorités installent des infrastructures le long de la route entre la capitale et Kronstadt, comprenant des panneaux de signalisation ainsi qu’un « pub » à mi-chemin[1]. L’île, connue sous le nom de Kotline — trop éloignée pour apparaître sur la cartographie — au début du XVIIIe, abrite la forteresse Saint-Alexandre et est pressentie, à un moment, pour devenir le centre[2]. Mais la géographie complique le projet : l’île est à vingt-neuf kilomètres de Saint-Pétersbourg[3] et elle est la première ligne défensive en cas d’attaque.
[1] Alexei Kraikovski et Julia Lajus, « Living on the river Over the Year. The Significance of the Neva to Imperial Saint Petersburg », dans Martin Knoll, Uwe Lübcken et Dieter Schott (éd.), Rivers Lost, Rivers Regained : Rethinking City-River Relations, Pittsburgh, University of Pittsburgh Press, 2017, p. 246‑247.
[2] Ibid., p. 246-247.
[3] Wladimir Berelowitch et Olga Medvekova, Histoire de Saint-Pétersbourg, Paris, Fayard, 1996, p. 20 et 32.
[4] Ibid.
Figure 5. Gestion hivernale de la Neva, port de secours, et bas-fonds. Veuillez appuyer sur les loupes pour de plus amples informations.
Si voguer sur la Neva est compliqué, le fleuve est également sujet à des crues récurrentes. Lors de son passage à Saint-Pétersbourg, Weber remarque que la capitale est à la merci des inondations. Il indique qu’à partir de l’endroit où la Neva se sépare en deux bras, la ville est exposée au risque d’élévation des eaux[31]. Ces catastrophes sont la conséquence de la localisation de Saint-Pétersbourg dans un bassin sujet à des épisodes cycloniques[32]. Durant l’automne, la baie de Saint-Pétersbourg est victime de forts vents venus de la mer Baltique qui provoquent de soudaines montées des eaux.
Si l’urbanisation doit composer avec le fleuve capricieux, les sols n’offrent aucune garantie qu’une ville puisse perdurer. Le choix de l’estuaire de la Neva comme emplacement va à l’encontre des principes qui font qu’un lieu est propice à l’établissement d’une ville[33]. Selon Bruce Lincoln, les sols sont de mauvaises qualités, voire stériles, posant la question de l’autosuffisance en matière de nourriture. La conquête des sols est une guerre permanente : « Virtually Every Foot of Land Reclaimed from the Marshes on witch St. Petersburg Was Built Had to be Filled with Oaken Piles Sixteen Feet Long and Driven their Full Lenght Into the Ground[34] ». Selon Lincoln, aucune ville d’Europe n’a eu à affronter autant d’obstacles pour fonder une cité. Dès lors, sur quels fondements cette ville a-t-elle été construite ?
La forteresse Pierre-et-Paul est aussi construite à partir de ces fondements artificiels grâce à une élévation des sols et l'implantation de pilotis comme l’ont précisé Berelowitch et Medvekova[1].
[1] Wladimir Berelowitch et Olga Medvekova, Histoire de Saint-Pétersbourg, Paris, Fayard, 1996, p. 44.
Le quai de l’amirauté est un bon exemple des efforts qui sont consentis pour pouvoir bâtir la capitale. Situé en aval de la Neva et de la forteresse Pierre-et-Paul, le quartier de l’Amirauté est rapidement devenu important. D’après Weber, les urbanistes veulent y construire plusieurs palais le long du fleuve. Toutefois, le terrain est bas et sujet à inondation. Weber révèle que des pieux sont installés le long de la rivière, de la poste — devant le palais d’été du tsar — jusqu’aux dernières maisons proches de la bouche[1]. Le but de ces pilotis est d’élever le niveau de la terre en raison de la vulnérabilité face aux inondations.
[1] Friedrich Weber et Malassis, Nouveaux memoires sur l’etat present de la Grande Russie ou Moscovie... Par un Allemand résident en cette cour, Paris, chez Pissot, 1725, p. 25-26.
Des espaces sont plus propices à l’établissement de la cité que le quartier de l’Amirauté, l’île Vassilievski ou encore Pétersbourg. Dans sa description, Weber affirme que certains endroits sont protégés des inondations. Les quartiers qui seront plus tard appelés Vyborg et Litenoi, situés dans l’est de la ville avant que la Neva se divise en deux bras, sont les lieux en question. D’après Weber, deux collines sont en vis-à-vis. L’une sur la partie haute à Vyborg, l’autre en aval sur Litenoi. Cette dernière est décrite par Weber comme une Presqu’île[1].
[1] Friedrich Weber et Malassis, Nouveaux memoires sur l’etat present de la Grande Russie ou Moscovie... Par un Allemand résident en cette cour, Paris, chez Pissot, 1725, p. 15-17.
Si Litenoi est sécurisé par une colline au niveau de l’arsenal, il est bordé au sud par un marécage qui n’apparaît pas sur la carte de Bush. L’endroit le plus sûr pour établir la cité est donc Vyborg puisque protéger des eaux par la topographie, et personne n’indique la présence d’un marais. La carte de Bush montre d’ailleurs que cet endroit n’est pas totalement vide, mais il ne fait pas l’objet de construction intense[1]. Il est probable, pour Pierre le Grand, que Vyborg ne remplisse pas les critères nécessaires, puisqu’éloigné de la bouche de la Neva, contrairement à l’île Vassilievski.
[1] Wladimir Berelowitch et Olga Medvekova, Histoire de Saint-Pétersbourg, Paris, Fayard, 1996, p. 42.
Figure 7. Composition des sols et aménagements urbains. Veuillez appuyer sur les loupes pour de plus amples informations.
La gravure de Bush implique qu’autour des années 1720, un réseau de canaux se serait développé sur l’île Vassilievski. Ce n’est pas forcément une réalité, mais pas un mensonge non plus. D’après Weber, c’est à partir de 1716 que les plans du tsar s’exécutent et que la construction du futur centre prend forme[1]. Des canaux sont bâtis sur l’île, mais le projet a coupé court. Les premiers cours d’eau sont construits de manière trop étroite et se remplissent de vase rapidement[2]. Les canaux rectilignes sont donc un projet vain, reflétant les difficultés qu’oppose l’environnement à une planification forcée.
[1] Friedrich Weber et Malassis, Nouveaux memoires sur l’etat present de la Grande Russie ou Moscovie... Par un Allemand résident en cette cour, Paris, chez Pissot, 1725, p. 40-41.
[2] Bruce Lincoln, Sunlight at Midnight, New York, Basic Books, 2000, p. 24.
Figure 8. L’île Vassilievski et ses canaux. Veuillez appuyer sur la loupe pour de plus amples informations.
Enfin, Bush montre Vassilievski dans un état de développement avancé avec la présence de canaux rectilignes sur la totalité de l’espace. De tels canaux ne sont pas sans rappeler la ville d’Amsterdam sur laquelle le tsar Pierre voue un fantasme. La ville hollandaise est un modèle pour la ville de Pierre puisque le système de canaux est utilisé depuis le XIVe siècle, alors que le futur centre commercial de l’Europe n’est encore qu’un village[5]. Mais c’est au cours du XVIIe siècle que le Ring de canaux d’Amsterdam va connaître son expansion, avec une forme semi-circulaire, de telle sorte que le centre est entouré par des canaux. L’objectif est d’en faire le principal moyen de transport de la cité permettant aux commerçants d’être à la portée du port tout en étant accessible pour la population[6]. C’est avec cette vision que Pierre le Grand aborde l’urbanisme sur l’île Vassilievski. Il veut que chaque bâtiment soit connecté à un canal pour s’en servir comme mode de déplacement.
La première organisation urbaine
Peu d’informations sont disponibles sur la situation des habitations de l’est de Pétersbourg. Ce quartier est appelé le Slabode des Moscovites. Slabode peut se traduire par faubourg selon le diplomate Weber[1]. Il est certain que le degré de développement montré par la carte n’était pas atteint lors de la réalisation de la source. Un plan, de la même époque que notre source, décrit une structure urbaine similaire à la gravure de Bush, mais comprenant le marécage évoqué précédemment qui borde ce quartier par le Sud[2]. La première carte, officielle, de la ville datant de 1737[3], publiée par l’Académie des sciences russe[4], montre que les habitations sur ce côté de la cité ne sont encore que partielles. Et donc, Bush offre une représentation exagérée du Slabode des Moscovites.
[1] Friedrich Weber et Malassis, Nouveaux memoires sur l’etat present de la Grande Russie ou Moscovie... Par un Allemand résident en cette cour, Paris, chez Pissot, 1725, p. 408.
[2] Johann Baptist Homann, « Topographische Vorstellung der Neuen Russischen Haupt-Residenz und See-Stadt St. Petersburg samt ihrer zu erst aufgerichteten Vestung: welche von Ihro Czaar Maj. Petro Alexiewitz aller Russen Selbst Erhalter etc., etc., etc. An. 1703 an der Spitze der Ost-See auf etlichen Insuln bey dem Außfluss des Neva Stroms erbaut und zur Aufnahm der Handelsschafft und Schiffarth für die Russische Nation mit einer mächtigen Flotte versehen worden / herausgegeben von Ioh. Baptist Homann, Der Röm. Kays. Maj. Geographo », 1720, https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b8490978m. (Consulté le 28 juillet 2020).
[3] Micheal J. Bitter, « The Forbes/Maas Chart of St Petersburg », dans Anthony Cross (dir.), St. Petersburg 1703-1825, Palgrave Macmillan, New York, 2003, p. 31.
[4] Académie des sciences de Saint-Pétersbourg, « Plan Imperatorskogo stolichnogo goroda Sankt-Peterburga, sochinennyy v 1737 », Saint-Pétersbourg, 1741.
Un élément visible en aval de Litenoi est la présence d’une rue, la future perspective Nevski. Les travaux de cette avenue commencent en 1712. Sa droiture est un effet prioritaire. La perspective traverse des espaces vierges et c’est également une volonté du tsar. Aucun marais, vallée, colline, eau ne doit faire dévier la perspective[1]. Cette dernière, linéaire et large, est pavée et la construction est terminée avant 1721[2]. Outre l’aspect urbain que revêt cette route, elle joint deux éléments symboliques de la ville : l’Amirauté et le monastère Alexandre Nevski. Moscou étant toujours perçu comme la capitale religieuse du pays, Pierre, par l’établissement du monastère sécurise le statut symbolique de la ville[3]. Le prince Alexandre Nevski est une figure notoire pour avoir défait les Suédois en 1240 et être devenu prince de Novgorod[4]. Il est canonisé au XIVe siècle et le monastère serait bâti sur les lieux de la victoire d’Alexandre.. L’Amirauté est la principale manufacture. Berelowitch et Medvekova y voient un lien entre le passé et l’avenir de la Russie[5]. La droite perspective permet de repousser les limites de la ville et de montrer la détermination du tsar à vouloir occuper et dominer maximum d’espace.
[1] Wladimir Berelowitch et Olga Medvekova, Histoire de Saint-Pétersbourg, Paris, Fayard, 1996, p. 79.
[2] Bruce Lincoln, Sunlight at Midnight, New York, Basic Books, 2000, p. 31.
[3] Denis J. B. Shaw, « St. Petersburg and Geographies of Modernity », dans Anthony Cross (dir.), St. Petersburg, 1703-1825, New York, Palgrave Macmillan, 2003, p. 14-15.
[4] Berelowitch et Medvekova., op. cit., p. 31-32.
[5] Ibid., p. 80.
Figure 9. Le Slabode des Moscovites (future Litenoi) et la perspective Nevski. Veuillez appuyer sur les loupes pour de plus amples informations.
L’étude de l’espace démontre les failles environnementales de l’estuaire de la Neva. La carte de Bush décrit une urbanité massive dans trois zones : l’île Vassilievski, l’île de Pétersbourg, et le Slabode des Moscovites (Litenoi). Trois zones d’habitations pour disperser les habitants et éviter un centre compact[37]. Après avoir montré que l’établissement de l’île Vassilievski relève plus du fantasme, les couches du SIG viennent apporter un éclairage sur l’utilisation des espaces : les points de rassemblement, les zones de peuplement, les rues, la prévention des incendies.
Bush montre que de nombreuses de maisons sont construites en amont de la Neva, au-dessus de la forteresse Pierre-et-Paul, sur l’île de Pétersbourg. Cette dernière regroupe les espaces commerciaux les plus importants de la cité avec deux grands marchés et s'installe comme la place mercantile de la cite.
Cet espace accueille plusieurs commerces importants de la ville, mais aussi un Slabode multiethnique. Il est décrit par Weber comme le quartier des Tatares, mais à l’intérieur de celui-ci vivent également Turcs et Kalmouks. Weber est élogieux envers leurs manières puisqu’il explique qu’on y vit mieux qu’à Paris, Rome ou Londres[1].
[1] Friedrich Weber et Malassis, Nouveaux memoires sur l’etat present de la Grande Russie ou Moscovie... Par un Allemand résident en cette cour, Paris, chez Pissot, 1725, p. 36.
L’intérieur du faubourg est rythmé par la friperie tatare. Elle rassemble de nombreux habitants qui viennent y trouver des textiles internationaux et d’autres objets insolites à bas prix. Cet endroit est très prisé par les voleurs qui n’hésitent pas à subtiliser certaines affaires à des passants, pour les revendre sous leurs nez[1].
[1] Friedrich Weber et Malassis, Nouveaux memoires sur l’etat present de la Grande Russie ou Moscovie... Par un Allemand résident en cette cour, Paris, chez Pissot, 1725, p. 35-36.
Dans cet espace se concentrent les commerces alimentaires qui vendent de la farine, des légumes, mais aussi ceux qui fournissent le mobilier des particuliers. Le feu est le danger de ce lieu intégralement bâti en bois[1].
[1] Friedrich Weber et Malassis, Nouveaux memoires sur l’etat present de la Grande Russie ou Moscovie... Par un Allemand résident en cette cour, Paris, chez Pissot, 1725, p. 37.
Ce marché est la principale place mercantile de la nouvelle capitale. Comme il est interdit pour les Pétersbourgeois d’avoir un magasin au sein d’un logis, c’est ici que les commerçants de plus de vingt nations différentes viennent vendre leurs produits[1]. Toutefois, la loi contre les boutiques chez les particuliers rend la logistique autour de cet espace difficile. Ce marché est le débarcadère central des marchandises qui arrivent par la terre, la mer, voir d’autres quartiers. Le bâtiment est de bois, sur deux étages et carré avec une cour intérieure accueillant les boutiques. Par conséquent, une grande foule semble se réunir quotidiennement autour du marché ce qui rend son accès difficile. Précédemment situé un peu plus au nord du quartier de Pétersbourg, ce marché a brûlé et a été relocalisé à cet endroit[2]. Il est aisé de comprendre la difficulté d’accès à l’île lorsque les citadins voguent simultanément vers ce carrefour.
[1] Friedrich Weber et Malassis, Nouveaux memoires sur l’etat present de la Grande Russie ou Moscovie... Par un Allemand résident en cette cour, Paris, chez Pissot, 1725, p. 32-34.
[2] Ibid.
Figure 10. Le Quartier Tatar, sa friperie et les marchés environnants, sur l’île de Pétersbourg. Veuillez appuyer sur les loupes pour de plus amples informations.
Avec les inondations, les incendies sont les principaux dangers qui guettent la capitale du tsar. Et pour cause, une grande partie de la cité est bâtie en bois. Toutefois, la ville met en place un système pour intervenir en cas de feu. Weber explique que les clochers sont occupés par des gardes qui sonnent d’une manière particulière pour signaler du danger. Pour mieux comprendre ce stratagème, les églises ont été repérées sur la carte de Bush permettant ainsi d’avoir une meilleure vision de ce système. L’Amirauté profite de la présence des clochers mais elle rassemble plus de palais d’importances. Sur l’île de Pétersbourg, place des marchés, dont l’un a déjà brûlé, un seul clocher est une sécurité insuffisante pour alerter du danger.
L’île de Pétersbourg est le point commercial et l’île Vassilievski doit devenir le centre sur le modèle d’Amsterdam. Il a été évoqué à plusieurs reprises que des exagérations résident dans la gravure de Bush et la représentation de l’île Vassilievski en est une, particulièrement sur les canaux et les bâtiments. Contrairement à ce qu’indique la carte, presque tout le développement de cette zone reste à faire. Si les canaux sont présents, si des maisons et des rues sont tracées, une très grande partie de l’île n’est pas défrichée[38]. La source montre Vassilievski comme habitée dans son entièreté, et elle n’est pas la seule. Le plan d’Homann décrit un développement spectaculaire de l’île, s’inspirant des croquis des architectes européens du tsar : Trezzini et Le Blond, qui répondent aux désirs du tsar entre fantasme et réalité[39]. Une façon pour Pierre le Grand de montrer aux autres nations l’avancée de la nouvelle capitale russe alors que cette île est encore un vaste espace humide et sauvage. Pour connaître la véritable croissance du projet, il faut attendre 1737 et la carte de l’Académie des sciences de Saint-Pétersbourg. Le plan montre que cette île ne sera pas le centre-ville. Ce rêve, celui de Pierre, est mort en même temps que le tsar en 1725.
Conclusion
La carte de Georg Paul Bush est une représentation entre réalité et fantaisie. Soit fidèle au désir du tsar mais également suivant les modèles planificateurs de Le Blond et Trezzini. C’est est une des projections du futur Saint-Pétersbourg si la cité devait demeurer sous le commandement de Pierre le Grand pour les années à venir. En termes de peuplements, les zones d’habitations ont été exagérées. Au regard des cartes publiées après les années 1730 et 1740, il est possible de dire que l’ampleur de la supercherie est importante du côté de l’île Vassilievski et du Slabode des Moscovites.
Le SIG a montré des difficultés topographiques et hydrographiques dans tous les coins de la cité : les pilotis sont utilisés pour la forteresse et les quais. Les terrains sont trop bas. Certains espaces sont marécageux. Les trois quarts de la ville sont sous la menace des crues. Il n’existe aucun pont à cause de la Neva. Cette dernière n’est pas accessible aux bateaux à cause des bas-fonds et des rapides. Les spécialistes de la ville sont unanimes pour affirmer que, de manière générale, les sols ne sont pas favorables à l’établissement d’une colonie. Toutefois Vyborg et Litenoi — malgré un marécage — sont protégés par deux collines et sont plus propices à l’établissement du centre-ville, mais n’entrent pas dans le carcan idéologique du tsar. Au regard du SIG, de la source en elle-même et de ses exagérations cartographiques, une réalité apparaît, soit la volonté des autorités de montrer une occupation importante de l’espace. Chaque île fait l’objet de projets, bien avancés d’après la carte, alors que dans la réalité l’intégralité du territoire est problématique quand vient le temps d’établir une capitale impériale.
Références
[1] Nicholas V. Riasanovksy, Histoire de la Russie, Paris, Robert Laffont, 2014, p. 242-243.
[2] Henri Troyat, Pierre le Grand: Biographie, Paris, Flammarion, 2007, coll. « La Galerie des Tsars », p. 91.
[3] Ibid.
[4] Nicholas V. Riasanovksy, op. cit., p. 243
[5] Ibid.
[6] Troyat, op. cit., p. 111-112.
[7] Hélène Carrère d’Encausse, Les Romanov : une dynastie sous le règne du sang, Paris, Fayard, 2013, p. 76-77.
[8] Nicholas V. Riasanovksy, op. cit., p. 245.
[9] Carrère d’Encausse, op. cit., p. 80.
[10] Wladimir Berelowitch et Olga Medvekova, Histoire de Saint-Pétersbourg, Paris, Fayard, 1996, p. 13-15.
[11] James H. Bater, St. Petersburg: industrialization and change, London, E. Arnold, 1976, p. 19-20.
[12] Berelowitch et Medvekova, op. cit., p. 44.
[13] Berelowitch et Medvekova Ibid., p. 11 et Troyat, op. cit., p. 160.
[14] Lincoln, op. cit.,p. 17.
[15] Berelowitch et Medvekova, op. cit., p. 43.
[16] Bruce Lincoln, Sunlight at Midnight, New York, Basic Books, 2000, p. 20.
[17] Troyat, op. cit., p. 160.
[18] George E. Munro, The Most Intentional City: St. Petersburg in the Reign of Catherine the Great, Plainsboro, Associated University Presse, 2008, p. 27.
[19] Paul Keenan, St Petersburg and the Russian Court, 1703-1761, New York, Palgrave Macmillan, 2013, p. 20.
[20] Troyat, op. cit., p. 160.
[21] Ibid.
[22] Ibid.
[23] Ian M. Matley, « Defense Manufactures of St. Petersburg 1703-1730 », Geographical Review, vol. 71, n° 4, 1981, p. 414.
[24] Berelowitch et Medvekova, op. cit., p. 31.
[25] Ibid., p. 50-51 et 69.
[26] Ibid., p. 56.
[27] Ibid., p. 50-53.
[28] Ibid., p. 73-75.
[29] Berelowitch et Medvekova, op. cit., p. 70.
[30] Mark Monmonier, How to Lie with Maps, Third Edition, Chicago, University of Chicago Press, 2018, p. 112.
[31] Friedrich Weber et Malassis, Nouveaux memoires sur l’etat present de la Grande Russie ou Moscovie... Par un Allemand résident en cette cour, Paris, chez Pissot, 1725, p. 52.
[32] Alexei Kraikovski et Julia Lajus, « Living on the river Over the Year. The Significance of the Neva to Imperial Saint Petersburg », op. cit., p. 244-246.
[33] Bruce Lincoln, op. cit., p. 20.
[35] Geert Mak, « Amsterdam as the “Compleat Citie”: A City Plan Read in Five Episodes », dans Sako Musterd et Willem Salet (dirs.), Amsterdam Human Capital, Amsterdam, Amsterdam University Press, 2003, p. 32.
[36] Ibid., p. 33-34.
[37] George E. Munro, op. cit., p. 25.
[38] Friedrich Weber et Malassis, op. cit., p. 41-42.
[39] Micheal J. Bitter, « The Forbes/Maas Chart of St Petersburg », dans Anthony Cross (dir.), St. Petersburg 1703-1825, Palgrave Macmillan, New York, 2003, p. 36-40.